Jamais il ne sut ce qui avait poussé leurs parents à les abandonner lui et sœur, personne ne leur raconta, personne ne le savait peut-être. Jamais il ne se permit d’y penser trop longtemps, après tout, il n’avait aucun souvenir d’eux, c’était à peine s’il se souvenait de cet orphelinat où on était venu les chercher si jeunes. Les souvenirs qu’il avait, en fait, n’étaient probablement qu’une construction à partir de ce qu’on lui avait raconté ou montré, après tout, les jumeaux n’avaient même pas deux ans lorsqu’ils avaient été accueillis au sein de la famille Bang. Cette famille devint très vite la sienne, comme il n’en avait jamais eu outre sa sœur, le prénom qu’ils lui donnèrent, Connor, fut bien vite le sien malgré sa sonorité étrangère, comme aucun autre n’avait semblé être prononcé rien que pour lui auparavant.

Enfant tranquille, un peu pot de colle, mais loin d’être lent d’esprit, il comprit vite la chance immense qu’ils avaient eu d’être emmené dans cette demeure aux airs de château et voua ainsi un culte automatique à ses habitants. Cela ne changea pas, malgré les mauvais traitements infligés par son frère adoptif dès un très jeune âge. Il fut poussé dans les escaliers, insulté, couvert de surnoms humiliants, mais était toujours aussi reconnaissant de ce qu’on avait fait pour lui. Cela ne changea pas, même lorsqu’il apprit ce que faisaient tous ces hommes venant rendre visite à leur père dans son bureau, et leur père par la même occasion. Il était dès lors clair dans sa jeune tête que jamais il ne ferait autre chose que de soutenir sa famille dans ces affaires. Cependant, il fut bien débiné de voir que contrairement à ses frère et sœurs, même la cadette qui elle aussi avait été adoptée, il ne semblait avoir aucun talent particulier. On lui avait appris à tirer, à bien viser, à se défendre. Mais l’instinct lui manquait, totalement. C’était comme s’il n’était pas fait pour cette vie. Cependant, fait ou pas pour celle-ci, c’était la vie qu’on lui avait donné, cent fois meilleure que celle de l’orphelinat.

Travaillant et sérieux, il tenta donc de trouver un autre moyen de se rendre utile. Sa nature amicale, paisible, craignant le conflit ne lui laissait pas beaucoup de choix. Mais il finit, éventuellement par se trouver étrangement à l’aise dans tout ce qui attrayait aux transactions, à l’administration, à la fructification des avoirs et fonds de la familia. Évidemment, être un des enfants du patron aidait à se faire rapidement une place dans le département de son choix, malgré ses études non-complétées. N’ayant pas autant d’assurance que ses frères et sœurs qui décidemment, qu’ils lui soient reliés ou pas, suivaient l’exemple parfait de leur père, les chiffres lui donnèrent un moyen de se sentir digne d’appartenir à cette famille. L’estime enlevée par les mots venimeux de son aîné qu’il feignait ignorer revint peu à peu alors qu’il se mettait à jongler avec les profits et les pertes, effectuant pourtant des blanchiments d’argent gagnés de manière qui aurait pu, même dû, sembler horrible à un jeune homme aussi honnête et bien intentionné que lui. Mais on lui avait appris que le bien et le mal étaient des choses bien subjectives. Et que toute ville en santé avait besoin de sa bande de voyous de haut vol.

Ce qui lui mets des bâtons dans les roues, malgré qu’il ait trouvé sa voie était son côté trop sentimental. Tombant amoureux sur un coup de tête, à répétition, il lui arrive de passer très, trop, près de faire une erreur fatale à sa famille, ses élans affectifs ayant don de lui faire perdre ses moyens et de lui briser le cœur pour un rien. Mais jusqu’à maintenant, il a toujours su éviter la catastrophe, après tout, pour rien au monde il ne voudrait leur nuire.